La soif de liberté est
totalement niée puisque
dans le système scolaire, tout est interdit sauf ce
qui est obligatoire. Il faut, à chaque moment, faire
ce que le maître dit
: croiser les bras, écouter, ouvrir ce cahier, écrire
en commençant à 3 carreaux de la marge ...
Pendant de longues heures, on interdit à des
enfants de rire, de rêver, de dormir, de parler avec les copains,
de remuer la tête, les bras, les jambes, d'exprimer ce qu'ils
ressentent ... On me fera remarquer qu'il serait incohérent
de supprimer toute liberté mais d'autoriser les enfants à parler
de ce que cette oppression leur fait vivre.
C'est sans doute l'interdiction de sortir qui fournit le meilleur
analyseur de la situation scolaire. Faut-il permettre de sortir
aux enfants qui le demandent ? Non, répondent beaucoup d'enseignants
qui soulignent que si l'on autorise, tous voudront sortir. Faut-il
en déduire qu'ils ne sont pas eux-mêmes convaincus
de l'intérêt de leur enseignement ? ou bien qu'ils
sentent la nécessité de plages de détente
plus importantes ? Mais si l'on interdit pour empêcher la
sortie-distraction, on va du même coup coincer l'enfant qui
est dans un besoin physiologique urgent. Le "vous n'aviez
qu'à prendre vos précautions" permet au maître
de soulager sa conscience mais ne permet pas à l'enfant
de soulager sa vessie... Le "Vous n'aviez qu' à prendre
vos précautions" (qui n'est pas loin du "J'veux
pas l'savoir" de la caserne) mérite qu'on y regarde
de plus près :
- S'agit-il d'un enfant dont la déviance physiologique ou psycho-physiologique
doit être réprimée comme jadis le malheur d'être
gaucher ?
- D'un enfant craintif qui redoute les bousculades de la récréation
?
- D'un enfant délicat qui espérait pouvoir éviter le détour
par ces lieux souvent sales, mal protégés du voyeurisme par
des demi-cloisons et des demi-portes non verrouillables?
- D'un enfant qui a donné priorité à son besoin de mouvement
et de jeu parce que son besoin physiologique se trouve en décalage
avec l'horaire officiel ?
- D'un enfant qui rêve d'échapper quelques minutes à l'ennui
et à l'immobilité soumise ? etc.
Arithmétique : Dans ce collège, il existe 40 W.C. pour 1000 enfants
; en supposant que tous aient la sagesse de prendre leurs précautions
pendant une récréation de 15 minutes, calculer le temps moyen
de passage pour chaque enfant.
1000/40 = 25. En 15 minutes chaque WC doit accueillir successivement
25 enfants. Cela fait théoriquement 36 secondes pour chaque enfant ! Si l'un d'eux
a besoin de 5 mn, il reste 10 mn aux 24 autres, soit 25 secondes par enfant ;
quant à l'éventualité d'un 2ème enfant qui prendrait
lui aussi 5 mn, j'ose à peine l'évoquer puisque dans cette hypothèse,
il reste aux 23 autres 5 mn soit moins de 14 secondes chacun.
Questions subsidiaires : 1- de combien de temps dispose chaque enfant
pour se délasser, après déduction du temps consacré aux excrétoires
précautions ? 2- Dans quel ordre se fait le passage libérateur
: le premier arrivé ? celui qui est le plus en détresse ? celui
qui a la carrure la plus respectable ? 3- Que doit faire l'élève
qui n'a pas encore réussi à passer au moment où retentit
la sonnerie de reprise des cours ?
Récréation : "1° détente, divertissement après
une occupation plus sérieuse - 2° temps de repos, de liberté accordé aux élèves
pour qu'ils puissent se délasser - antonymes : ennui, travail".
(Petit Robert)
En réalité, la récréation dans un collège,
c'est le temps nécessaire pour les changements de classe, les allègements
physiologiques, éventuellement le passage au secrétariat, l'absorption
d'un casse-croûte, d'ultimes et fébriles révisions… Il
n'y a plus de récréations, en d'autres termes, l'enseignement secondaire
ne juge pas nécessaire un temps de repos, de liberté accordé aux élèves
pour qu'ils puissent se délasser.
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