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Grandeur de la prière
et urgence d'une réforme
 

 

 

"Parler familièrement
avec le Roi des rois
"

Question - "Montrez la grandeur de la prière 
Réponse - Si c'est un honneur de converser, de s'entretenir avec les grands de ce monde, d'obtenir une audience de quelque roi de la terre, combien à plus forte raison en est-ce un de parler librement et familièrement avec le Roi des rois, le Souverain de l'univers." (...)
On a le droit de prendre quelque distance avec ce qui semble une évidence pour l'honorable chanoine que fut aussi l'abbé VANDEPITTE. Je n'ai aucune estime particulière pour "les grands de ce monde" et obtenir une audience de quelque roi de la terre ne me fait pas rêver. Il s'agit du cours de persévérance ! Quand j'avais huit ans, peut-être… A cette époque, j'ai d'ailleurs prié, et même j'ai insisté. A aucun moment, je n'ai eu le sentiment de "parler librement et familièrement avec le Roi des rois, le souverain de l'univers.", ni d'ailleurs avec qui que ce soit. Rétrospectivement j'en suis venu à faire l'hypothèse qu'il y a une énorme différence entre avoir la foi et croire - comme on croit au Père Noël, parce qu'on n'a pas encore rencontré le copain qui vous fait découvrir que l'adulte peut aussi mentir. J'ai cru mais jamais je n'eus la foi : Je disais des mots appris, avec docilité, mais ces mots ne me parlaient même pas à moi-même. Ces vêtements d'humilité servile dont les prêtres m'invitaient à envelopper ma pensée, ne me convenaient pas plus que les louanges insistantes et balourdes qu'il fallait réciterpour se concilier les bonnes grâces de la divinité. Je n'ai jamais aimé qu'on s'humilie devant moi ; comment aurais-je pu estimer un Dieu qui trouverait encore du plaisir dans l'humiliation des humains. D'ailleurs à aucun moment, je n'ai eu le sentiment qu'il y avait un abonné au numéro que j'avais demandé… Plus tard, j'ai senti une certaine connivence avec VIGNY écrivant dans je ne sais plus quel poème :

"Le sage opposera le dédain à l'absence
Et il ne répondra que par un froid silence
Au silence éternel de la divinité."

Audience royale

Mais acceptons un instant l'image de l'honorable chanoine : Imaginez-vous, amie lectrice, conversant librement et familièrement avec la Reine d'Angleterre. Vous avez rédigé un petit compliment de quelques lignes que vous avez fait traduire en latin par quelque clerc, et après une révérence pleine de grâce, vous le lui récitez. Elle daigne sourire pour vous montrer qu'elle comprend comme vous la langue sacrée. Encouragée par un tel accueil, et vous inspirant du Rosaire, vous lui répétez votre compliment 149 fois. Après vous avoir écoutée attentivement, il est certain qu'elle ne pourra plus rien vous refuser. Elle aurait bien trop peur de devoir vous accorder une nouvelle audience. Cette expérience bien qu'imaginaire, m'inspire une grande compassion pour la Reine du Ciel : Avez-vous pensé à l'incommensurable ennui de devoir sans jamais prendre de repos - compte tenu des décalages horaires - écouter des millions de fidèles récitant interminablement les mêmes formules, obligée de traduire simultanément dans la langue céleste, des Ave en finnois, en tchèque, en serbo-croate, en japonais, en espagnol et je ne parle pas du latin qu'ELLE affectionne particulièrement.

Le 7ème jour, Dieu se reposa

Tout de même, si j'étais théologien, j'insisterais pour que Dieu le Père et la Mère de Dieu (Mater Dei) aient le droit, eux aussi, de se reposer un jour par semaine, de préférence le 7ème jour, ainsi qu'il est écrit dans la Genèse. On supposera que ce n'est pas le samedi, mais le dimanche.…). Et puis, j'inviterais les fidèles à rechercher la qualité plutôt que la quantité, à créer leurs propres textes plutôt que de reprendre sans cesse des formules qui n'apprennent plus rien à personne et surtout pas à leurs célestes destinataires. N'est-ce pas insulter à la majesté divine que de La condamner ainsi au ron-ron de la dévotion, que de La nourrir avec des conserves vieilles de plusieurs siècles. Pensez-vous conserver la faveur du Tout-Puissant en vous en tenant à l'impudente devise :

Le sempiternel, c'est toujours assez bon pour l'Eternel !

N'avez-vous donc pas remarqué que Son auguste goût a changé, l'âge venant ? Auriez-vous l'idée aujourd'hui de Lui offrir la fumée d'un bouc ou d'une brebis dont jadis Il était si friand ? Et s'Il vous ordonnait, comme Il l'ordonna jadis au dévot ABRAHAM, d'égorger votre unique enfant, ne penseriez-vous pas tout en aiguisant paisiblement le couteau, qu'Il veut seulement éprouver votre totale soumission à Sa volonté ?

'Igor Reitzman

Extrait de

II - Contribution de la religion
à l'installation de la soumission



Abbé VANDEPITTE, Explication du catéchisme à l'usage des cours de persévérance, page 301 – 1903, 9ème édition, avec "la chaude recommandation de l'archevêque de CAMBRAI" (39ème mille !).- Tous ceux que cet extrait a séduits, seront heureux sans doute de savoir que l'on peut aussi lire du même auteur : Catéchisme de 1ère communion (1899) et Petite civilité de l'enfant chrétien (1897) Il faudrait voir à la B.N.